Choix et techniques

Perspective
La vue en perspective axonométrique (sans point de fuite, ni hiérarchie de plans) permet de prolonger les dessins à l'infini sans contrainte de représentation perspective. Ainsi, une page terminée, il me suffit d'en rajouter une autre pour continuer la ville. Mes dessins peuvent donc s'étendre. Cette perspective présente toutefois un défaut : elle déforme les reliefs ou les rend difficilement représentables. Elle écrase les collines, aplatit les montagnes, nivelle les pentes et déforme les surfaces. Ces imperfections accentuent les différences avec un dessin purement technique ou une perspective conventionnelle construite selon les règles. Elle donne une identité particulière à mes villes et les signe.

Différentes visions
Je pars souvent du « centre » ancien, m'en éloigne pour me rapprocher des quartiers plus périphériques. Cette vue du ciel permet d'avoir un regard entre plan et perspective. Les dessins sont faits pour être vus de loin comme l'on verrait depuis un avion. On devine les axes qui dessinent la ville, on repère des éléments ou des architectures plus intéressants. Mais ils sont aussi faits pour être observés de près, dans leurs détails les plus cachés. On peut ainsi découvrir les particularités architecturales, les intérieurs la plupart du temps insoupçonnés, voir par dessus les murs et au-delà des façades. Il y a deux niveaux de lecture.
De même, certains dessins accentuent la géométrie du dessin. La ville peut être aussi vue comme une composition presque abstraite où les lignes et les formes, les pleins et les vides, les fouillis des graphismes s'organisent, jouant sur les équilibres et les contrastes.

La technique
La technique adoptée n'est pas un choix. Elle s'est imposée à moi comme une évidence. Je suis à l'aise avec ma page blanche, mon crayon, ma gomme et mon rotring 0,2 ; les seuls outils indispensables pour la réalisation de mes dessins. Certains essais au stylo feutre à pointe fine n'ont pas été concluants : l'encre ne résiste pas à la lumière du soleil et certains dessins sont voués à rester dans le noir ou à disparaître doucement... A mon grand regret, la ville devient alors éphémère.
La technique au trait en noir et blanc renforce cette sensation de lecture multiple. En effet, vu de loin, l'ensemble donne un grisé assez uniforme duquel se détachent cours d'eau, voies urbaines et places principales. De près, le trait fin et régulier dessine les détails des façades, l'imbrication des toits, la végétation. Il renforce l'idée de dessin, voire de technicité sans être du dessin technique ; même si l'outil de prédilection est un rotring détourné à des fins plus artistiques. Sans être de la gravure, le résultat s'en rapproche et peut faire penser aux gravures de villes des XVIIe et XVIIIe siècles.
Le dessin au trait laisse apparaître les crayonnés préparatoires. Puisque chaque rue, chaque maison a été pensée, posée et dessinée au sol au crayon, il me paraît important de conserver cette trace. Le crayonné donne aussi plus de vie au trait parfois trop régulier du rotring. Il donne de la richesse et participe à la construction du dessin.
En plus des traits réguliers les derniers dessins sont enrichis de graphisme toujours en noir. Ils mettent en valeurs certaines architectures ou accentuent la trace d'axes principaux. Ces graphismes peuvent aussi matérialiser des différences de matériaux ou des cours d'eau.

La durée de réalisation
Toutes ces étapes représentent un travail considérable et très variable. En effet, la dimension du dessin est l'élément principal du temps de réalisation. La complexité des architectures et des recherches peut aussi engendrer des temps supplémentaires de conception (le dessin d'un centre ville aux détails concentrés est plus long à réaliser que des quartiers périphériques aux espaces plus aérés et moins denses).
Ce travail minutieux nécessite des périodes de repos. L'avancée progressive du dessin demande de prendre du recul pour regarder les propositions crayonnées avec un regard neuf. Il faut laisser le dessin et prendre le temps de se ressourcer. Parfois même, je peux traverser de longues périodes où je ne suis pas inspiré ou motivé. J'abandonne alors le dessin pour mieux le reprendre plus tard. A l'inverse, je peux rester acharné au travail parce que les idées fusent. L'envie d'avancer est forte.
Enfin, je dessine sur mes temps de loisirs ce qui rend irrégulier mon assiduité et rend difficile d'évaluer le temps total passé sur le dessin.
C'est pour ces raisons que je ne connais pas le temps nécessaire à la réalisation d'un dessin.